Alors que l’on commémorera, le 3 juillet, le 40 e anniversaire de la mort de Jim Morrison, le mystère qui entoure, depuis 1971, les circonstances exactes de son décès est en passe d’être définitivement levé avec le témoignage de l’animateur, producteur, journaliste et écrivain Sam Bernett, qui publie aux éditions du Rocher une courte biographie du chanteur des Doors (1), dans laquelle il détaille les derniers jours de sa vie à Paris, à l’été 1971.
Sam Bernett qui a débuté sa carrière en 1966 à RTL, était en 1971 journaliste à Europe 1. Outre ses activités dans la presse, il était également le fondateur et l’animateur du Rock’n’Roll Circus, mythique club parisien du 57 rue de Seine à Saint Germain, fréquenté par la plupart de stars du showbiz de l’époque.« L’équivalent du Palace pour les années 70 » se souvient Bernett qui fonda ensuite Le Bus Palladium et l’Elysée Matignon, entre autres établissements célèbres. C’est au Rock’n’Roll Circus qu’il apprit à connaître le chanteur des Doors, dont il dresse un portrait assez peu flatteur. « Morrison était venu à Paris pour échapper à la justice américaine qui lui reprochait de s’être exhibé à un concert de Miami, raconte le biographe. Il disait à tous ceux avec lesquels il parlait en avoir assez d’être une rock star. Il voulait être considéré comme un poète et avait même confié à Johnny Hallyday , avec lequel il s’était lié d’amitié au Rock’n’Roll Circus, son intention de quitter les Doors ». Hélas pour lui, Jim Morrison était déjà, à 27 ans, physiquement usé par sa vie de rockstar et il buvait énormément . « Au club , presque personne ne reconnaissait, en ce géant barbu et hirsute, le chanteur des Doors » raconte Bernett. Sa compagne Pamela Courson, avec laquelle il s’était installé à Paris, était héroïnomane et, selon l’enquête menée par l’auteur c’est pour lui trouver une dose d’héroïne qu’il avait donné rendez vous ce soir là (samedi 2 juillet 1971) au Rock’n’Roll Circus à deux dealers de ses connaissances .
Mise en scène
Bernett se souvient l’avoir aperçu accoudé au bar avec ces deux hommes qu’il ne connaissait pas, puis l’avoir perdu de vue dans la foule du samedi soir. Peu après 2 heures du matin, une employée lui signale qu’un client est enfermé aux toilettes depuis plusieurs dizaines de minutes. Sans réponse du dit client, Bernett , aidé d’un videur, défonce la porte et découvre le corps inanimé de Jim recroquevillé sur les toilettes. Il fait appeler dans la salle un client médecin qui constate le décès, visiblement dû à une overdose d’héroïne. « Il n’avait pas l’habitude de se shooter, mais peut-être a-t-il voulu goûter la poudre que les deux autres voulaient lui vendre. Comme elle était pure à plus de 90%, son cœur n’y a pas résisté » suppute Bernett. C’est alors qu’interviennent les deux "amis" de Jim, alertés par le remue-ménage . Bousculant tout le monde, ils embarquent le chanteur inanimé en prétextant que ce n’est qu’un évanouissement et qu’il a besoin de prendre l’air. Trop content de se débarrasser d’un cadavre aussi encombrant et sourd aux protestations de Bernett qui veut, dit-il, appeler la police, le gérant de l’établissement les laisse faire et ils disparaissent avec leur chargement. Selon Bernett, ils auraient ramené le corps de Jim à son appartement, réveillé Pamela Courson qui dormait et organisé la mise en scène de sa mort officielle, par arrêt cardiaque suite à un malaise dans sa baignoire. Celle que Pamela racontera à Agnès Varda, amie parisienne du couple, appelée au petit matin par l’Américaine désemparée. « Varda refuse catégoriquement d’en reparler depuis des années, constate Bernett. Sans doute parce qu’elle a conscience de s’être fait balader». La nouvelle du décès du chanteur des Doors, qui vivait à Paris sous son vrai nom ( James Douglas Morrison), ne sera connue que quatre jours plus tard (2) et frappera le monde de stupeur. Après Jimi Hendrix et Janis Joplin, Jim Morrison était la troisième rock star à mourir à l'age de 27 ans (club que rejoindra plus tard Kurt Cobain).
Pourquoi Sam Bernett a-t-il attendu 40 ans pour témoigner alors que la rumeur de la mort du chanteur par overdose dans un club parisien circulait dès le lendemain et qu’elle alimente depuis le mythe Morrison ? « J’ai mis longtemps à me remettre de cet épisode dramatique et à me persuader qu’il valait mieux dire la vérité que de laisser planer le doute indéfiniment » explique l’auteur. Je savais qu’avec le 40 e anniversaire de sa mort cela allait encore ressortir et qu’on m’interrogerait à nouveau sur la rumeur. C’était le moment de tout dire une fois pour toutes ». Tant pis pour les fans qui croient encore que Jim est vivant et qu'il a organisé sa disparition pour échapper au star system.
(1) « Jim Morrison » par Sam Bernett aux éditions du Rocher 190 pages 18 €. Lire également « Jim Morrison Ailleurs » aux editions Roymodus, BD d’où sont tirées les illustrations de cet article.
(2) (2) le décès est confirmé le 6 juillet par Bill Siddons le manager des Doors. Le 7, Jim Morrison est inhumé au Père Lachaise où sa tombe est aujourd’hui encore la plus visitée du cimetière.
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