Une homme, une femme, un village de Toscane. Lui (William Shimel) est écrivain et Anglais.Il vient donner une conférence sur son dernier essai « Copie conforme », dans lequel il défend la thèse audacieuse selon laquelle la copie vaut mieux que l’original.Elle (Juliette Binoche) est Française, et tient une galerie d’art dans le village.Elle arrive en retard à la conférence et en repart avant la fin. Le lendemain, il la retrouve à sa galerie. La conversation s’engage sur les objets qu’elle expose. Ils décident de la poursuivre en se promenant. Leurs échanges sont étrangement familiers.Lui affecte une certaine froideur, mais semble attiré par elle.Elle lui trouve visiblement du charme, mais s’emporte parfois contre lui comme pourrait le faire une épouse. D’ailleurs au café où ils s’arrêtent, on les prend pour un couple marié.Ils jouent le jeu. Presque trop bien.Se connaissent-ils déjà? Depuis quand? Que savent-ils vraiment l’un de l’autre.Et de l’art, de l’amour et du désir qui alimentent leur étrange conversation? Savent-ils aussi ce qu’ils veulent l’un de l’autre?Une seule certitude : lui doit reprendre le train de neuf heures...
Grand habitué du Festival (Il y a déjà présenté neuf de ces films a reçu la Palme d’or en 1997 pour le Goût de la cerise et a présidé la Caméra d’or en 2005), le cinéaste iranien Abbas Kiarostami y présente cette année le premier film tourné hors de son pays. Il pourrait s’intituler « Un homme et une femme en Toscane » et on aurait résumé l’affaire. Pas de chabada.La caméra de Kiarostami ne lâche pas les deux acteurs d’une semelle. On ne voit qu’eux.Même leur conversation finit par n’être plus qu’un fond sonore rendu musical par le mélange des langues (français, anglais, italien). À la fin, on ne retient que leurs visages, leurs gestes, leurs regards, tour à tour étrangers, familiers, amoureux, empourprés de colère, de frustration ou de désir.Le dispositif, déjà minimaliste au départ, se réduit à presque rien. A l’essentiel, peut-être.
Avec ce film très conceptuel Kiarostami va diviser la Croisette, le public (le film sort en salles aujourd’hui) et probablement aussi le jury.Ce sera tout ou rien. Presque deux heures de marivaudage triste, même sur fond de paysages toscans, ça peut, en effet, paraître sacrément long... ou très épatant! Ou les deux à la fois.Car il faut tout de même un sacré talent au réalisateur et aux deux acteurs pour tenir la gageure. Et du talent, ces trois-là en ont à revendre. On le savait pour Binoche et Kiarostami.On le découvre pour le baryton d’opéra William Shimel, dont c’est le premier rôle au cinéma. Une révélation.