On adoooore ou on déteste le cinéma de Gaspard Noë pour les mêmes raisons et, le plus souvent, avec la même passion. Moins dérangeant qu’Irréversible (dont la scène la plus insoutenable était le viol-massacre de Monica Bellucci dans un souterrain, filmé en plan fixe d’une quinzaine de minutes), son nouveau film Enter the Voïd propose une expérience de cinéma hallucinogène, dans laquelle la caméra figure l’esprit errant et malade du héros, petit camé abattu par la police dans les wc d'une boite de nuit, qui refuse de quitter le monde des vivants .
À l’écran, cela donne d’interminables travellings aller-retour au-dessus des rues poisseuses, des appartements minables, des bars glauques et des hôtels de passe tokyoïtes où évoluent les personnages. Le tout systématiquement éclairé en rouge, et commenté en voix off d’outre tombe par le défunt. Deux heures et demi de vire-vire en caméra subjective dans les bas-fonds de la capitale nippone à vous coller le mal de mer avec, comme clou du spectacle, une scène de pénétration vue de l’intérieur (!) qui avait fait hurler de rire les festivaliers lors de la projection de presse cannoise.
« Puéril, drogué et morbide », crient les détracteurs de Gaspar Noë. Les autres objectent l’originalité de la mise en scène et la prise de risque de ce cinéma trippant et expérimental. Gaspar Noë est-il un génie incompris ou un imposteur immature bloqué au stade anal? Pour trancher définitivement le débat, il faudrait qu’il se décide un jour à filmer un vrai scénario et pas seulement une idée de film raconté à l’envers ou du point de vue d’un mort.
PS : Depuis sa présentation l’an dernier à Cannes, où il a déchaîné les passions (mais pas spécialement impressionné le jury d’Isabelle Huppert), Enter the Voïd a été « raccourci » de quatre minutes, mais augmenté d’un pré-générique fulgurant de deux minutes. Ne le ratez pas : c’est ce qu’il y a de mieux dans le film.
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