Une nouvelle tournée commence. Nous partons en Belgique, très exactement en Flandres, à Neerpelt. Pas loin de 650 kilomètres à parcourir, et des journées très courtes en ce mois de novembre, le départ est prévu à 7h30. Heureusement la lune est quasiment pleine et nous éclaire quand nous nous levons et sortons du camion. Bruno vient avec nous sur toute la tournée, nous sommes arrivés hier pour être sûrs de ne pas avoir de retard. J'ai retrouvé mon camion très humide : on sent qu'il n'a pas été chauffé pendant trois semaines. Tout était recouvert de condensation, le pire étant dans la cabine où je dors : la matelas n'était pas vraiment sec, d'autant plus qu'une petite infiltration d'eau a tendance à le mouiller dans un coin. Nous avons donc décidé, pour cette nuit, de dormir en bas, sur la banquette qui forme un U autour de la table : en ajoutant des lattes, ça se transforme en lit. L'humidité a surtout eu raison de nos jolies statues en pâte à sel, que nous étions censés peindre sur cette tournée : j'avais oublié que la pâte à sel, même bien cuite pendant tout une journée, peut se réhumidifier... ce qui la rend très fragile... voire toute molle... Les statues se sont toutes effondrées et sont inutilisables, je suis bien obligée de me rendre à l'évidence : la poubelle est leur seul avenir...


Il est bien difficile ce matin de trouver une place dans les véhicules, nous errons quelques temps avant d'y arriver ! Je pars avec Johanna et Loulou, qui remplace Patrick aux lumières sur cette tournée. A moins que ça ne soit au son ?... Oui bon d'accord c'est la honte, je ne sais toujours pas qui fait quoi ! On joue à trouver des mots qui se terminent par la même syllabe, ça nous occupe un certain temps. Bin quoi, il faut bien les occuper, les 11 heures de route ! Et je ferai remarquer aux mauvaises langues qui diront "on reconnaît bien là le pur jeu d'instit" que ce n'est pas moi mais Johanna qui l'a lancé !
Nous roulons bien jusqu'à Paris, où nous tombons dans un magnifique embouteillage qui nous fera bien perdre une heure ! Nous sommes passés par l'A86. Apparemment... fallait pas ! En même temps, on aurait aussi pu se retrouver coincés avec l'une des deux autres possibilités (Périph' ou Francilienne)... C'est surtout l'idée de la route qui nous reste à faire qui use notre patience !

Nous nous arrêtons peu après Paris pour déjeuner, mais cette fois pas dehors ! Bruno et moi mangeons avec Bernard et Sylvie, dans leur jolie caravane : il y a au fond une banquette qui prend toute la largeur, là où sont les fenêtres, j'aime beaucoup ce coin. Heureusement Sylvie avait préparé une soupe qu'ils partagent avec nous : ça nous réchauffe car dehors ça caille sévère ! Après le repas il y a un jeu de "sièges auto musicaux" : nous ferons la seconde partie du voyage ensemble, avec Anaïs. Nous avons de la chance : la météo n'est pas si mauvaise que prévu : il y aura juste un peu de pluie dans l'après-midi. En passant dans le Nord, nous voyons des terrils sur le côté de la route.

Le passage de la frontière est assez étrange : les camions sont déviés par une espèce de parking plein de nids de poule énormes, que nous aurons juste à traverser avant de retourner sur la route normale... Peut-être était-ce pour nous prévenir de la qualité des routes qui nous attendaient ?!... Eh oui, car il faut bien le dire : les routes belges sont toutes pourries !!! Il y a des ornières creusées dans le bitume, par endroits, et il faut faire attention avec les caravanes car apparemment si les roues de la caravane se mettent dedans on est ensuite comme sur des rails, on ne peut pas en ressortir. D'ailleurs la métaphore des rails va être filée : la qualité de la route est telle que je n'ai pas l'impression d'être dans un camion mais dans un vieux train de campagne où on sent chaque jonction de rails ! Ceci dit, nous remarquons que ça a l'air de s'améliorer au bout de quelques temps. Nous en concluons deux interprétations : soit les Belges essaient de nous faire fuir quand nous entrons sur leur territoire, soit la Wallonie a moins d'argent pour entretenir ses routes que les Flandres... La place sur laquelle nous nous rendons est en effet située en Flandres, pas très loin de la frontière hollandaise.

Nous retrouvons Carole, Gino et leurs enfants sur un parking (ils sont partis directement de chez eux, en Normandie) et arrivons à Neerpelt vers 18h30. Tout le monde est bien fatigué. Enfin : on va pouvoir se poser, faire les tracés pour le montage de demain et dîner... Vous y avez cru, hein ? Eh bien nous aussi ! Mais non !... Car lorsque nous arrivons à l'endroit prévu, la personne qui nous accueille semble étonnée par la quantité de camions qui se sont engagés sur le chemin menant au stade. Et encore, il ne voit pas tout le monde... La barrière de la langue ne facilite pas les choses. Un organisateur parlant français arrive. Je les vois discuter un certain moment, puis Gino passe, visiblement assez agacé. Il semblerait que l'importance de notre convoi n'ait pas été bien mesurée, et qu'il n'ait pas été prévu que les véhicules soient garés autour du chapiteau, sur le stade de foot qui nous accueille. Effectivement, les caravanes des autres cirques sont placées dans des petits coins autour du stade, mais pas sur l'herbe. Les gens ne semblent pas non plus spécialement au courant des besoins en eau et en électricité (60 ampers), ce qui a le don d'agacer fortement : une notice technique résumant les divers besoins est toujours envoyée, à retourner signée en même temps que le contrat, mais ce n'est pourtant pas la première fois qu'ils rencontrent ce genre de problème. Après les 11 heures de route, cette arrivée folklorique ne fait pas rire grand-monde. En attendant d'être fixés sur les conditions d'installation des camions, le tracé commence, car demain le montage doit avoir lieu.


J'emmène les enfants faire un petit tour du stade pour que les autres puissent tracer tranquillement. Il fait nuit et assez froid, mais les enfants sont tout contents de se dégourdir les jambes après cette journée passée dans les camions. La vision des autres chapiteaux dans la nuit est assez féérique.

Les guirlandes lumineuses sont accrochées à des poteaux en forme d'allumettes, ce qui amuse beaucoup les enfants.


Après notre petit tour de stade nous revenons vers l'emplacement (futur!) de notre chapiteau : les autres m'apprennent que les camions et caravanes vont bien être installés autour du chapiteau, mais qu'on attend un tracteur pour pouvoir les remorquer sur le stade, afin d'abîmer le moins possible la pelouse du stade de foot (à ce moment-là, je crois que les organisateurs ont encore l'espoir de préserver cette belle pelouse...)
Je pense à ma journée de classe de demain et me dis que ça va être de la grosse improvisation, ce qui me stresse un peu (nous n'avons que trois jours d'école ici, donc il va falloir faire du condensé). Heureusement, Hélène me propose de me prêter un "lampadaire électrique", une sorte de lampe-tempête, pour pouvoir travailler un peu. Je vais donc dans mon camion pour préparer la journée de demain : j'ai assez de lumière, et ici au moins, à défaut de faire chaud, il n'y a pas de vent ! Je me mets donc au travail, emmitouflée dans mon manteau. A un moment, le camion se met en branle : ils vont l'installer sur le stade. Ca bouge pas mal, je range les stylos pour qu'ils ne tombent pas mais continue à bosser dans ce mouvement, c'est très drôle.


Tout le monde sera finalement installé vers 21h30... Chacun rentre chez soi pour dîner et se coucher. Notre matelas étant encore très humide, je demande à Carole si nous pouvons squatter le "camion-bureau" (qui est équipé d'un lit accueillant parfois des invités) pour la nuit, en attendant de trouver le moyen de faire sécher le matelas. Demain le montage, initialement prévu à 8h30, a été repoussé à 9 heures : nous avons gagné une demi-heure de sommeil, youpi !