« Sold out ». D'ordinaire, c'est à l'entrée des spectacles que l'on trouve ce type d'écriteau pour indiquer qu'il n'y a plus de places en vente. À Dubaï, c'est sur les panneaux géants qui annoncent la création d'un centre commercial ou d'une tour de 70 étages. « Tous nos appartements sont vendus depuis trois ans » affirme le représentant d'Emaar Properties, qui achève la construction de la plus haute tour du monde, la déjà fameuse « Burj Dubaï Tower » : plus de 160 étages commercialisés au double du prix du marché, déjà élevé. Au Mipim, le salon  mondial des professionnels de l'immobilier, qui s'est tenu il y a quelques jours à Cannes, cela n'a semblé étonner personne.
L'émirat de Dubaï est le pays au monde qui connaît le développement le plus rapide. En 15 ans, sa population a triplé pour dépasser aujourd'hui le million et demi d'habitants. À plus de 80 %, il s'agit d'expatriés. Et malgré les tours, toutes plus hautes et plus design les unes que les autres, qui poussent comme des champignons jusqu'à 50 kilomètres du centre-ville historique, malgré les palais de 1 500 m2 (tous identiques), bâtis sur les trois « Palmes », ces presqu'îles artificielles gagnées sur la mer, ils ont toutes les peines à se loger. « Le prix des loyers ne cesse de grimper et acheter devient difficile, même avec un bon salaire et sans impôt », confie Jean Marc Sanchez, un ami Tropézien installé dans l'émirat depuis treize ans avec sa femme et ses deux enfants.

Dubaï aurait-il définitivement contracté la folie des grandeurs ? Après « la plus haute tour du monde », l'émirat prévoit de construire « le plus grand pont en arc » (12 voies de circulation sur 1,7 km de long et 64 m de large) et « le plus long métro aérien ». Il reliera le centre-ville au « plus grand aéroport du monde », en construction dans la zone de Jebel Ali, jadis aux confins du désert, aujourd'hui aux portes de la plus mégalo des mégalopoles. Le « Jebel Ali Airport » devrait accueillir en 2015 plus de 120 millions de passagers- le double de Roissy !-, qui s'ajouteront aux 70 millions de l'aéroport actuel, célèbre pour son Duty Free géant.
Aux Awards du Mipim, l'émirat occupait encore cette année plus du tiers des candidatures dans la catégorie « tall buildings », avec six nouvelles tours qui s'ajouteront bientôt aux 600 déjà existantes. Sans compter celles de l'Atlantis Palm, réplique du fameux hotel à thème des Bahamas, bâti en moins d'un an sur la "Palme" de Jumeirah (photo ci dessus).

Et deux autres projets pharaoniques ont également été dévoilés à Cannes : le « Mudon », du groupe Dubai Properties, qui vise tout simplement a recréer sur un même site les villes historiques de Bagdad, Beyrouth, Damas, Le Caire et Marrakech. Et l' » Arabian Canal », un canal de 75 kilomètres de long et 150 m de large pour irriguer le désert et faire verdoyer les nouveaux quartiers de l'Emirat champignon. Tout cela devra être achevé pour 2015, date limite fixée par le sheikh Mohammed al-Maktoum pour le développement urbain de Dubaï.
Cernés par les buildings et les autoroutes à 12 voies, qui font aux carrefours des nœuds inextricables sur trois niveaux, les Dubaïotes pourront alors vivre en paix, sans le charroi incessant des camions et des grues. Du moins, l'espèrent-ils...