Réalisateur décidément prolifique et éclectique (on lui doit notamment Ma vie en l’air, Le premier jour du reste de ta vie et, très récemment, Un heureux événement), Rémi Bezançon raconte avoir écrit le scénario de Zarafa en 2001, alors qu’il n’était encore qu’aspirant réalisateur.
Pourquoi l’histoire (vraie) de cette girafe offerte à Charles X, roi de France, en 1826, par le pacha d’Égypte Méhémet Ali, l’avait-elle marquée au point de vouloir en faire son premier film?« Je me souviens seulement que les ingrédients me paraissaient réunis pour faire un beau dessin animé à l’ancienne » répond le réalisateur.
L’histoire de Zarafa, première girafe à avoir traversé l’océan pour être montrée en France (au Jardin des plantes), méritait en effet d’être contée et le dessin animé paraissait un bon choix pour le faire. Mais n’ayant aucune expérience de l’animation, Rémi Bezançon préféra mettre le projet de côté pour réaliser d’abord quelques films en prises de vues réelles. Ce n’est qu’en 2008 qu’il ressortit le scénario du tiroir pour le proposer à la productrice Valérie Scherman qui lui adjoint les services d’un co-réalisateur issu du monde de l’animation.C’est ainsi qu’intervint Jean Christophe Lie, qui a fait ses classes chez Disney, (où il a notamment travaillé sur Le Bossu de Notre Dame, Tarzan, Hercule et Simbad), avant d’être associé à deux des meilleurs dessins animés français de ses dernières années, Les Triplettes de Belleville et Kirikou. Il y a d’ailleurs beaucoup de similitudes entre l’univers de Kirikou et celui de Zarafa, à commencer par l’Afrique où débute l’histoire et par le personnage de Maki, le petit garçon qui soulèvera les montagnes pour protéger la girafe et la ramener dans son pays.

Mélange de techniques
Mais la réussite et l’originalité de Zarafa, tant sur le plan visuel que sur celui de la narration, tient surtout au mélange des techniques issues du cinéma traditionnel et du cinéma d’animation, ainsi qu’au choix judicieux de la 2D qui lui donne le charme discret du dessin animé à l’ancienne. Ainsi par exemple, les comédiens Simon Abkarian, Thierry Frémont, Ronit Elkabetz, Deborah François, François Xavier Demaison et Mohamed Fellag, qui incarnent les différents personnages, ont enregistré leurs voix avant qu’ils soient dessinés, ce qui a permis un rendu plus réaliste des scènes de dialogues.
Le revers de la médaille, c’est que l’animation traditionnelle demande beaucoup de temps et de ressources. Comme l’explique Jean Christophe Lie, un dessinateur produit moins de 2 secondes d’animation par jour et un film d’une heure quinze comme Zarafa contient 1195 plans qui ont nécessité quelque 150000 dessins. Au final, 250 animateurs répartis dans huit studios différents en France, en Europe et en Asie, ont travaillé sur le film qui a coûté un peu plus de 8,5 millions d’euros et a pris plus de deux années à fabriquer.
« Moi qui aime que tout aille vite, j’ai appris à mes dépens que l’animation était l’école de la patience et de l’humilité, confie Rémi Bezançon. Heureusement que j’ai pu tourner un nouveau film en prises de vues réelles entre-temps, parce que je crois que je serai devenu fou en attendant la fin de la réalisation de Zarafa ».
C’est effectivement pendant la postproduction du dessin animé que Bezançon a tourné Un heureux événement, la comédie avec Louise Bourgoin et Pio Marmaï, qui est sortie fin septembre. On y voit d’ailleurs quelques images de Zarafa, au détour d’une scène dans laquelle le personnage joué par Pio Marmai regarde un programme pour enfants à la télévision..