Quand il dit que cet été à « Nellcôte » a changé sa vie, Dominique Tarlé ne plaisante pas. Après son été passé avec les Stones à Nellcote, Tarlé a lâché la photo et a fait mille métiers pour subsister avant de revenir à ses anciennes amours. Il travaille actuellement dans un laboratoire professionnel de tirages photographiques et vit de ses expos et des ventes des photos de Nellcote qu'il s'est enfin décidé à exploiter...

– Comment t’es-tu retrouvé embarqué dans cette histoire avec les Stones ?

– A la base, j’étais fan de blues et je m’étais arrangé pour faire des photos sur la tournée de Buddy Guy en France. C’est le manager de Buddy Guy qui m’a présenté à l’entourage des Stones. Je suis parti à Londres suivre leur tournée d’adieux à l’Angleterre et ça c’est enchaîné. Quand j’ai débarqué à Nellcôte c’était juste pour une séance de photos. Je pensais y rester la journée. Au moment de partir, j’ai demandé si quelqu’un pouvait me raccompagner à la gare. Anita, l’ex-femme de Keith Richard, a dit « Pas question, tu restes. D’ailleurs ta chambre est prête ». Et voilà...

– Quels souvenirs gardes-tu de ton séjour là-bas ?

– C’était vraiment le paradis sur terre. Keith et Anita étaient des gens adorables, c’était la fête permanente avec toujours vingt personnes à table : le groupe, les amis, les visiteurs... Même les gamins du coin faisaient partie de la famille. Un jour, John Lennon est passé. Il est resté une demi-heure enfermé avec Keith et il est reparti en vomissant dans les escaliers. Une autre fois, Jagger vient me voir et me dit « J’aime beaucoup les photos que tu fais ici ». J’en avais même pas encore tiré une seule ! Je suppose qu’il voulait dire qu’il aimait bien l’attitude que j’avais : en retrait, effacée. Keith le dit dans la préface du bouquin : « On n’imaginait même pas qu’il travaillait en même temps que nous, ce qui est rare ! » Je prends ça pour un sacré compliment.

– Pourquoi ne pas avoir publié toutes ces photos plus tôt ?

– Je n’avais pas envie qu’elles soient mal utilisées. Et puis, un jour, j’ai fait ce cauchemar atroce. J’ai rêvé que les Stones venaient de sortir un nouvel album et que j’étais trop vieux et trop sourd pour l’écouter ! (rires) ça m’a décidé à sortir les photos »

– Est-ce que Keith Richards t’a félicité pour la qualité d'Exile, qui est quand même le plus bel album de vacances 71 dont il puisse rêver ?

– C’est pas trop le genre de la maison. Mais je sais qu’il en a acheté pour tous les autres Stones et sa dédicace m’a beaucoup touché. Quand j’ai décidé de faire le livre, j’ai demandé à Anita ce qu’il en penserait.

Elle m’a dit texto : « Quand il verra les photos, il va en pleurer ». Ni elle, ni Keith n’avaient rien gardé de cette époque fabuleuse ».