On m'avait demandé de fermer les deux yeux et moi je vous voulais pas. On m'avait expliqué tout l'intérêt que l'on pouvait trouver à faire le silence quelques minutes mais c'était pour moi trop difficile parce que moi, je voulais simplement pouvoir écrire ... Jetant un coup d'oeil autour de moi, c'est bon, j'y vais ..

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Vaste prairie, verte contrée ...
et bien oui, moi, je suis assis, les yeux fermés, là, sur de l'herbe fraîche et ... j'essaie de me reposer malgré mes rhumatismes, ma goutte et mes retours gastriques.
Je sais, je ne devrais pas vous parler de moi mais bon, c'est mon sujet de conversation favori.


J'ai des doigts de pied en éventail, tranquille, relax, dans mon maillot de bain deux pièces (ben oui quoi, je suis une femme).
Je m'imagine ainsi baignant sous un beau soleil d'été, des lunettes de soleil et une crème à bronzer à portée de main, écoutant la mer et les cigales ... Bref j'essaie d'oublier cette fin de printemps pourri (chez nous, dans le Nord), et aussi, c'est vrai, les regards accusateurs des passants qui me voient, là, m'exhibant sur une pelouse de mon quartier

Malgré toutes ces contraintes, je fermais de nouveau les yeux pour tenter d'ériger autour de moi des barricades d'indifférence et de vaine frustation d'être encore chez moi.

Et là, tout doucement, je me sentais bien, plongeant alors, avec avidité, dans les lymbes de mon imagination (je sais il se la péte), suivant les courants marins des abysses de ma mémoire (et vous avez raison), je ressort enfin à la surface et me retrouve alors sur la cime d'une montagne enneigée.

Après avoir profité de la vue, je remarque qu'il y a, là, à côté de moi, un canard ... et bien oui un canard !
Coin-coin ! Coin-coin ! - Tu veux aller aux toilettes ? Là tu as mal choisi ton coin ...
- Coin-coin ! - Ehh ohhh ! tu me laisses un peu tranquille ...
- Coin-coin ! - Ok, c'est bon, je t'écoute !

- Coin ! Coin ! - D'accord ... et puis quoi d'autres ?
- Coin-coin ! Coin-Madame ! - Hein ! tu as dit quoi ?
- Coin ! Coin-Madame-Madame ! Réveillez-vous !


Une main sur mon épaule me fait sursauter. Un policier municipal est en train de m'accorder, non pas une danse mais une contredanse pour exhibition en public.
Toute penaude, je récupère mes affaires et me retrouve ainsi à la recherche d'un nouveau lieu de villégiature pour bronzer. Au détour d'un carrefour, je remarque un bac à sable isolé.

Retrouvant mon calme et ma sérénité, je ferme les yeux et je m'imagine alors, tranquille, sur le sable fin d'un désert marocain.

- Je suis bien ici ...
Mais ! mais qu'est-ce qui se passe ! ...

Je ressent des gouttes d'eau sur ma peau ... Bon ben si c'est juste des gouttes, ça va ! Malheureusement les gouttes se transforment en une belle averse ...

- Ok là, je sais que je suis revenue en Normandie ...

...


Juin 2009