Enfant star passé à la réalisation avec succès depuis Splash (1984), Ron Howard s’est affirmé au fil des ans comme un excellent raconteur d’histoires et un réalisateur de blockbusters remarquablement efficace.On lui doit notamment Willow, Backdraft, Da Vinci Code, Appolo 13 et Rush, mais aussi des œuvres plus ambitieuses comme Un homme d’exception, qui lui valut l’Oscar du meilleur réalisateur en 2001, Nixon/Frost ou En Direct sur Ed TV. Son nouveau long-métrage, Au Cœur de l’océan se situe entre les deux, avec des scènes très spectaculaires mais aussi une (petite) réflexion sur l’Homme et la nature et sur la création littéraire. Éminemment sympathique, chaleureux et ouvert (comme son modèle Steven Spielberg ), Ron assume son statut de faiseur et ne s’embarrasse guère d’exégèse sur son travail, préférant s’en tenir à une lecture très littérale de ses films…

Moby Dick fait-il partie de vos livres de chevet et avez-vous songé à en faire une nouvelle adaptation?
Je l’ai lu au collège, mais je préférais Conrad à Melville.Je n’étais pas tellement attiré par le côté poétique du roman.Je n’ai jamais pensé à en faire une adaptation, d’autant qu’il y en a eu plusieurs, pour la télévision notamment.Raconter à nouveau cette histoire archiconnue ne m’intéressait pas. C’était plus intéressant, à mon avis, d’y faire référence, avec l’histoire vraie du baleinier Essex dont s’est inspiré Melville. C’est un récit moins épique, mais aux composantes plus modernes : la chasse à la baleine y est décrite comme le véritable business qu’elle était à l’époque.Il y a des composantes économiques, écologiques et bien sûr humaines…

Lequel de ces aspects vous a le plus intéressé à mettre en scène?
Clairement la survie de l’équipage après le naufrage. La plupart de mes films racontent des parcours d’hommes. Ce qui m’intéresse, c’est de montrer comment ils évoluent en fonction des circonstances dramatiques auxquelles ils sont confrontés.Dans le film, le combat de l’Homme contre la nature n’est qu’une composante de l’histoire de survie.

Comment choisissez-vous vos projets de films?
Il faut que je tombe amoureux de l’histoire et que je sente que je peux apporter quelque chose, techniquement ou humainement. J’aime tous les genres de cinéma et ce que je préfère par-dessus tout c’est explorer de nouveaux univers. Je continue à le faire, c’est important. J’aime prendre des risques, c’est excitant.

Quels étaient les défis à relever sur ce film-là?

Déjà, tourner en pleine mer.Je ne suis plus phobique mais j’ai quand même toujours un peu peur de l’eau.Il y avait aussi la transformation physique des acteurs à gérer.Il a fallu les affamer et ce n’était pas simple.J’ai dû virer du plateau quelques techniciens qui arrivaient avec leurs sandwiches, alors que les comédiens n’avaient mangé qu’une tranche de tomate dans la journée (rires). Maintenir le moral des troupes n’a pas été facile, mais on a géré ça en équipe, comme un défi sportif…

Le choix de Chris Hemsworth?

C’est lui qui m’a apporté le scénario sur le tournage de Rush.C’aurait été sacrément impoli de ne pas le prendre! (rires).Mais quand j’ai lu l’histoire, c’était évident qu’il était né pour incarner Owen Chase.

La mémoire des baleiniers est-elle toujours vivace aux États-Unis?

Non, c’est de l’histoire antique.Il y a quand même des musées qui leur sont consacrés et que j’ai visités. Il y a beaucoup de documentation et d’images d’époque disponibles.L’huile de baleine alimentait un pan important de l’économie industrielle avant le pétrole.C’est un peu gênant aujourd’hui de montrer que les baleines étaient considérées comme une ressource naturelle mais c’était la réalité.Il faut le voir à travers le prisme de l’époque. On ne fait pas l’apologie de la chasse à la baleine, au contraire!