Ainsi passe la vie, de l'un à l'autre va

Se fait et se défait, s'invente, se prolonge

S'endort dans des maisons que bâtissent les songes

Se rêve et s'éveillant ne se reconnaît pas.



Ainsi passe la vie. Quand le soleil va naître

Il partage déjà ses hautes graminées

Ses nuages, ses fleurs, ses défuntes années

Son devenir de feux passant dans nos fenêtres.



Ainsi passe la vie. On entend des bourdons

Tracer dans la lumière un sillage illusoire

Pour lui seul le poète écoute ses histoires

Et plonge au coeur des fleurs pour apprendre leurs noms.



Ainsi passe la vie à surpendre un langage

Inaudible et pourtant comme l'herbe vivant

De l'éternel azur qui n'est fait que de vents

De silence, d'attente et d'autres paysages...



Pierre SEGHERS