Compte à rebours avant la fin du monde. – 15 (à suivre)

Je me prends un mal de crâne. J'en ai terminé avec l'opérateur téléphonique qui m'a contacté pour me vendre un autre forfait, et ses conseillers incompétents, désobligeants- heureusement une petite jeunette est arrivée qui a réglé mon problème en trente minutes au lieu de trois heures comme l'avait prétendu la bientôt retraitée revêche. Comme quoi, une petite jeune. Je sais que ça ne fera pas plaisir, mais c'est ainsi. Bref, j'ai stressé comme un malade à cause du parc mètre que j'allais devoir réalimenter en urgence. Enfin quelque chose de positif, les aubergines ne m'ont pas collé de prune ! Ouf ! La vie quoi… avec ses aléas. Sans blague, après la fin du monde, ça va me manquer.

Moi, d'habitude si prolixe, je me trouve bien en peine pour alimenter le sujet d'une mort générale imminente, d'en parler sérieusement mais avec la légèreté qui sied à ce qui est dérangeant. Il est vrai que, même entrevue à long terme, l'idée me dérange du fait même qu'elle est une certitude qu'entretient l'incertitude de l'échéance. Pour le coup l'annonce farfelue, ou pas, ne m'apaise qu'en en parlant d'une manière faussement décontractée. Je suis persuadé qu'un grand nombre d'entre nous le ressent ainsi.

Un peu dans l'urgence pour rédiger, j'œuvre en écoutant les nouvelles du J.T. Ce soir il est question d'un appel météorologique à la vigilance, les Vosges ont reçu un large quota de neige et les routes y sont verglacées. Ici, en Savoie, la neige arrivera au milieu de la nuit. Et voilà que ce sera une mauvaise neige collante, la poisse quoi, espérons que la valse des saleuses saura être efficace pour ne pas rééditer le fiasco que nous avons déjà pu connaître. Bon, par bonheur, façon de parler, il s'agit d'un jour de semaine et donc les Ponts et chaussées seront au complet.

Madame la ministre Taubira , interrogée sur l'enquête réalisée dans les centres pénitenciers reconnaît leur état d'insalubrité et parle de l'attribution de crédits. Le reportage présente des images chocs qui interpellent sur des conditions de vie indignes. Une promesse de plus ! Florange s'éteindra avec la fermeture de ses hauts-fourneaux. Un responsable syndicale en appelle au gouvernement avec des accents pathétiques ; l'affaire est complexe et les rebondissements donnent aux ouvriers l'impression d'avoir été trahis.

Ha, la technologie n'en finira pas de nous épater et de générer des richesses : les connexions au web seront bientôt possibles par la lumière ; la fulgurance supplantera-t-elle la lumière ? Du côté sociétal, il est question d'une nouvelle méthode venue des Etas –unis favorisant les relations des parents et enfants : fermeté et flexibilité supprimant les mesures coercitives au profit des conventions familiales. Finie, l'éducation à la manière de grand-papa, le coup de pied aux fesses, la paire de claques de l'instit, les colles, les coups de règle sur les doigts, la position à genoux en soutenant un dictionnaire au bout de chacun des bras. Tant mieux ? Dommage ? Tout compte fait, seul le temps pourrait nous le dire. Qui vivra, verra, n'est-ce pas ?

Il serait inconséquent de regarder tout cela de loin sous prétexte que nous pourrions passer à la moulinette le vingt- un, le vingt- deux étant attribué depuis toujours aux gens respectables d'une certaine administration. Ainsi, les braves travailleraient à perte en cette période puisque les procès ne seront peut-être jamais perçus. A cette heureuse perspective d'éviter le paiement des amendes s'oppose le terrible dilemme : « ne plus payer, le chaos, au gré des circonstances ». Je n'ai jamais entendu les gisants applaudir dans leur tombe le fait de n'avoir plus à s'acquitter de l'impôt. Non, bien que le silence soit éloquent, et disposé à ce que nous le remplissions à notre convenance. Le silence et la parole font le lit de l'incertitude ; alors, il ne reste plus que la révélation du Salut. Je ne suis ni prophète, ni mage, ni prêcheur. Je ne suis qu'un spectateur et j'ai aussi mauvaise vue. Mais j'écoute, ce soir justement, Vals à l'émission télévisée « Des paroles et des actes. ». Ministre de l'intérieur, pas facile !

J'ai souvent entendu les gens s'exclamer : « on ne va pas refaire le monde ! ». Certes ! Si c'est la fin du monde annoncée pour bientôt, quelle importance il est vrai ! S'il est vrai, alors le vingt et un nul ne subira plus la vie, ni sa mort. Se peut-il que l'âme se trouve séparée de la chair ? C'est l'idée qu'à l'homme d'une vie après la mort qui crée son tourment. Aussi, je termine aujourd'hui mon propos par cette citation partielle :
« Car c'est l'éternité qui est en cause, et non pas une seule heure : cette éternité dans laquelle les mortels auront à passer tout le temps qui reste à courir après la mort. » (Lucrèce)
D'accord, d'accord, quand bien même nous adhèrerions à cette nouvelle conduite, c'est plus la brutalité de l'occurrence qui reste présente à notre esprit. D'où viendra le danger, quel élément sera l'initiateur de cette fin du monde. Un déluge, un déchaînement cosmique, un immense ouragan, un embrasement gigantesque. Ho ! Je vais encore avoir des difficultés pour trouver le sommeil.

Pas vrai, même pas peur !

A suivre avec Pierre sur "Poesiephiloseliste"