Une amie de trente ans me dit récemment qu’elle ne sait pas ce que c’est que de se sentir repue à la fin d’un repas. Je n’avais jamais constaté qu’elle mangeait plus que quiconque, au contraire. Ce qui signifie qu’elle a appris à s’arrêter quand elle se considère comme suffisamment nourrie. Ce ne doit pas être si facile! Mais voila qui s’apparente, bien qu’elle ne le sache pas, à cette sobriété heureuse que prônait ce matin Pierre Rahbi sur France Inter.
J’ai beaucoup de respect pour cet homme, fervent partisan d’agriculture biologique, qu’il a pratiqué au Burkina Faso il ya plus de quarante ans, mais dont il disait ce matin que ce n’est pas suffisant pour sauver notre planète, exploitée à mort par tous ceux qui nous poussent à croire que nous n’avons jamais assez de tout.
Pendant ces soldes hivernales qui rendent les gens prêts au crime pour se saisir plus vite que leur voisin du torchon ou du pantalon à prix « sacrifié », dont ils n’ont même pas besoin, c’est bien le concept de sobriété qui pourrait peut-être leur rendre la raison.
Ce qui plombe nos sociétés atteintes par le nuage noir de la récession associé à la fin des ressources terrestres, c’est moins la difficulté de combler nos besoins, nous dit Rahbi, que celui de combler notre soif de superflu. Une soif impossible à étancher puisqu’elle est sans cesse attisée par l’existence de nouveautés à posséder de toute urgence pour ne pas se sentir minables dans la compétition sociétale qui fait rage.
Nous apprenons de plus en plus tôt que le bien n’a aucun intérêt s’il n’est pas un mieux par rapport aux « autres ».
Et les autres deviennent vite des rivaux qu’il faudra toute sa vie surpasser non seulement avec ses notes mais avec un cartable et des vêtements de « marques », puis le dernier portable, puis la plus belle voiture ….
Tout le monde sait ça ? Sans doute. Mais qui fait le lien entre cette sournoise obsession d’être le plus fort, le plus riche, le plus puissant et la véritable lèpre qui contamine les politiciens quelle que soit leur étiquette ?
On a vu des socialistes quitter le radeau pour entrer dans le gouvernement Sarko, et abandonner ensuite ledit radeau sans vergogne, afin de monter leur petite affaire pour traquer une éventuelle notoriété associée à quelques prébendes confortables.
« On va faire de la politique autrement » qu’ils disaient, ceux qui m’ont décidée en fin de vie à entrer dans un parti ! Et finalement on apprend que le quatuor de tête tente de se hisse aux postes législatifs convoités en enfonçant la tête de celle qu’ils ont poussée à les représenter, sous l’eau trouble des marécages électoraux.
Mais les premiers feraient rire plutôt que convaincre. Quant au quatuor aux dents longues, il provoque une marée de récalcitrants qui voient clair dans son jeu. Réussiront-ils à épurer la situation ? Sans doute pas pour la dominer, mais peut-être pour changer son orientation.
L’important en cette période cataclysmique est de rejoindre par quelque sentier que ce soit la multitude éparse des « indignés » ou encore la campagne « Tous candidats », lancée par Pierre Rahbi. Il s’agit de convaincre chacun de commencer par se changer lui-même, de supprimer de ses objectifs tout ce qui encombre sans apporter de véritable satisfaction et, conjointement, de découvrir en soi tout ce qui peut faire passerelle vers les autres. Peut-être sortira-t-il un jour de cette masse de citoyens apaisés ceux qui seront cette fois dignes de les représenter parce qu’ils auront suivi d’abord ce chemin escarpé.
Ecrit par une ancienne amie qui n'aime pas que l'on publie ses textes...Désolé Mylène...
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